Le Cercle des Histoires
"Le Cercle des Histoires", développé durant la résidence de Jumana Emil Abboud, est centré autour du partage collectif de contes et histoires. À cette occasion, découvrez trois histoires racontées par l’artiste.
Tunjur Tunjur
- Jumana Emil Abboud, Scouting for enchanted sites in Palestine, 2014
Il était une fois une femme qui n’avait pas d’enfants, elle implora : "Seigneur, pourquoi de toutes les femmes, suis-je ainsi ? Accorde-moi une fille, même si elle n’est qu’une marmite, je l’aimerais quand même !" Dieu exauça son souhait et un jour, elle tomba enceinte. Un jour est venu, un jour est passé, et le jour est venu où elle accoucha et donna naissance à une marmite. Que pouvait faire la pauvre femme ? Elle la lava, la nettoya bien, mit son couvercle, et la posa sur l’étagère.
Un jour, la marmite se mit à parler.
"Maman," dit-elle, "descend-moi de cette étagère !"
"Ma fille !" répondit la mère, "Où vais-je te mettre ?"
"Qu’est-ce que ça peut te faire ?" dit la fille. "Fais-moi descendre, et je te rendrai riche pour les générations à venir."
La mère la posa sur le sol. "Maintenant, met mon couvercle," dit la marmite, "et laisse-moi devant la porte." La mère la posa devant la porte en mettant son couvercle.
La marmite commença à rouler, en chantant :
"Tunjur, Tunjur, clink, clink, clink, clink !"
Elle roula jusqu’à ce qu’elle arrive à un endroit où les villageois ont l’habitude de se rassembler.
Au bout d’un moment, des personnes commencèrent à arriver. Un homme s’arrêta et trouva la marmite. "Eh !" s’exclama-t-il, "qui a mis cette marmite au milieu du chemin ? Je vais être damné ! Quelle belle marmite ! Elle est probablement en argent." Il la regarda sous toutes ses coutures.
"Eh !" appela-t-il, " À qui est cette marmite ? Qui l’a laissée là ?" Personne ne la réclama. "Si Dieu le veut," dit-il, "je vais l’emporter chez moi."
Sur le chemin du retour, il passa chez le vendeur de miel. Il la fit remplir de miel et la rapporta à sa femme. "Regarde, femme", dit-il, "comme cette marmite est belle !" Toute la famille en fut très heureuse.
Deux ou trois jours passèrent, et ils eurent des invités. Ils souhaitèrent leur offrir du miel. La femme descendit la marmite de l’étagère. Poussa et tira sur le couvercle, mais elle ne s’ouvrit pas ! Elle appela son mari. Tira et poussa, mais il ne put l’ouvrir. Les invités se mirent aussi à la tâche. Soulevant la marmite, la laissant tomber, l’homme essaya de l’ouvrir avec un marteau et un ciseau. Il essaya tout, mais cela ne servit à rien. Ils firent venir le forgeron, qui essaya encore et encore, mais en vain. Que devait faire l’homme ? "Maudits soient vos propriétaires !" il maudit la marmite. Et, la prenant, il la jeta par la fenêtre.
Quand ils eurent tourné le dos et ne pouvaient plus la voir, elle se mit à rouler, en disant
"Tunjur, Tunjur, ô ma maman,
Dans ma bouche, j’ai apporté le miel.
Tintement, tintement, ô ma maman,
Dans ma bouche, j’ai apporté le miel".
Récit issu et adapté de Ibrahim Muhawi, Sharif Kanaana, Speak, Bird, Speak Again : Palestinian Arab Folktales Berkeley, University of California Press, 1989.
Il était une fois…. Des grenades rondes et délicieuses
- Well at Kobar
Il était une fois…. Des grenades rondes et délicieuses. Mais maintenant, après 70 ou 100 ans d’errance, nous voilà de nouveau au même autre endroit, et nous voilà de nouveau au même autre endroit.
Autrefois, mardi dernier, dans un pays où le vol et la barbarie étaient autorisés. Le monde en réalité, ne faisait qu’encourager leur pratique, et si quelqu’un pratiquait l’oubli, cela était aussi très bien accueilli. Si le roi lui-même réclamait votre femme, vos années, votre nom, vos larmes, alors Voom ! C’était à lui ! Une fois, dans cet endroit, était arrivé au village de Comfortably Numb (Confortablement Engourdi), un homme à la recherche du bonheur. Le nom de cet homme est aujourd’hui Ma’ruf. A peine entré dans le village, il tomba sur une jeune femme du nom d’Almaza, qui se tenait près du puits en face du supermarché d’El-Ein. Almaza pleurait et pleurait, ses larmes coulait au fond du puits.
Savez-vous ce qu’on dit des puits de village où les habitants n’ont jamais soif ?
« Qu’est-ce qui vous fait pleurer ? » lui demanda-t-il. « Je pleure mes frères et cousins perdus. » Ma’ruf apprit bientôt que – d’après les récits de certaines vieilles femmes - la goule du village avait emprisonné les frères et les cousins d’Almaza. Ma’ruf, tombé amoureux au premier regard de ce joyau, jura de les sauver. Il sauta dans le puits pour trouver la goule qui, dans sa demeure, dansait avec des pierres ou bien était en train de sucer de la viande sur des os ? C’est difficile de se souvenir.
« Je te dévorerai ensuite », s’exclama la goule affamée, sautant pour défendre sa maison contre cet intrus.
Ma’ruf était expert dans l’art de tromper une goule...
« D’abord, laisse-moi te donner le cadeau que je t’ai apporté »
Et les yeux de la goule s’élargirent comme ceux d’un jeune enfant nécessiteux
« Très bien alors, donne-moi ton cadeau et je te dévorerai après »
« D’abord, dis-moi quels sont ces trésors de magie que tu as ici sur ton étagère ? »
La goule se vanta joyeusement de ses jouets
« Ce bol en bois – peu importe ce que tu lui demande - par exemple : "Bol en bois, remplis-toi de riz et de viande" - il se remplira, et tu pourras manger jusqu’à ne presque plus pouvoir bouger !" » « Ce petit moulin, un trésor divin, vois comme il est petit, il tient dans ta poche ! Si tu tournes la poignée vers la droite, il te donnera de l’eau pure et délicieuse ; et à gauche, une mer entière ! » « Ce bâton, si tu lui dis : "Ô mon bâton, continue à avancer et à frapper mon voisin !" le bâton continuera à frapper tes voisins jusqu’à ce qu’ils te rendent tout ce qu’ils ont volé. »
« Et ça qui brille, qu’est-ce que c’est ? » demanda Ma’ruf
« Ce sont les yeux des frères-devins qui voient toutes choses avec le courage de voir, sans se détourner. Ils sont tels qu’ils sont dans cette jarre des jarres.
Et ce sont les âmes des cousins, ceux-là même qui vous rappelaient autrefois toutes les choses qui sont une extension de vous-même. Elles sont telles qu’elles sont dans cette jarre.
« Cette jarre toute seule, est-ce la même ? »
« Dans cette jarre, je garde ma propre âme » répondit la goule indigente.
Il était une fois, … Ils étaient une fois
Trois frères qui ne vivaient pas très loin d’ici / d’elle.
- Jumana Emil Abboud, Looking for springs, Kobar village, Palestine, 2014
Il était une fois, … Ils étaient une fois
Trois frères qui ne habitaient pas très loin d’ici / d’elle et qui appréciaient une bonne partie de chasse. Avant que je vous parle de la chasse ; quelques mots sur leur mère, la grande Reine. Leur mère était une grande Reine, mais elle savait que son heure était bientôt arrivée. Elle leur dit, « Écoutez ! Je suis sur le point de mourir. Promettez-moi de régner comme j’ai régné, avec équité et compassion. »
Et effectivement, un jour est venu et un jour est passé,
et un autre jour est venu et un autre est passé, et la Reine mourût.
Ils l’enterrèrent aux côtés de son quatrième mari, qui, dans son enfance, était fermier, au pied de l’irréprochable source d’eau de Ein Qinya. Un jour est venu et un jour est passé, et un chêne miraculeux poussa là où son corps reposait.
Et chaque jour les frères rendaient visite à l’arbre en respectant l’eau qu’elle longeait avec son tronc massif.
Puis, un jour (hier ou demain), une gazelle apparût soudainement devant eux et Oh, elle leur en mit plein les yeux ! Les trois frères débâtèrent sur qui devait la chasser. Celui-là a dit, « Elle est ma proie ! » et celui-ci dit « Elle est à moi ! » Finalement, ils décidèrent que si la gazelle passait près de l’un d’entre eux, alors elle était à lui et pas à un autre.
Je dois vous dire qu’elle n’était pas vraiment une gazelle. C’était une jeune femme du monde des esprits, capable de se transformer, à son gré, en sa forme animale.
Elle les observa, et, comme une bonne personne se distingue toujours, elle choisit l’un des frères, l’aîné, Alqaader, et elle passa juste en dessous de son cheval.
« Très bien, mes frères », annonça Alqaader. « Vous devez partir maintenant. Elle est à moi. »
Il chassa la gazelle et chassa la gazelle, jusqu’à ce qu’il la perde dans l’étendue sauvage d’une nouvelle colonie illégale, et là, il tomba sur une lionne qui mettait bas avec difficulté. Elle supplia le jeune homme de l’aider et il l’aida, et en retour la lionne donna à Alqaader trois poils de la crinière de ses deux nouveaux nés. « Si un jour tu es dans une position délicate, frotte juste cette crinière, et en un clin d’œil, nous serons là. »
Au matin, gazelle apparut encore et ils firent comme ils avaient déjà fait. Elle lui en mit plein la vue et courut. Oubliant le monde et le monde derrière lui, Alqaader sauta et la poursuivit, jusqu’au moment où, le quatrième jour, gazelle le conduise dans sa propre ville.
Cette gazelle a des prétendants dans le monde entier. Voyez son château ? Chaque fois que l’un vient lui demander sa main, son père dit, « Celui qui peut déplacer cette montagne peut avoir sa main ; et celui qui échoue sera immédiatement emprisonné dans une jarre »
J’ai raconté cette même histoire à Alqaader, et savez-vous ce qu’il a dit ? Il a dit : Je vais demander sa main !!
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