Liv Schulman - Le Goubernement
La Villa Vassilieff invite l’artiste Liv Schulman à investir tout son espace d’exposition pour présenter sa nouvelle série de films : Le Goubernement. Cette série est une fiction en 6 épisodes mettant en scène le destin et les oeuvres d’artistes femmes, lesbiennes, trans, non-binaires ayant vécu à Paris entre les années 1910 et 1980. Le Goubernement propose une narration de l’art engagée et une nouvelle manière de raconter l’histoire, non pas en retraçant des événements, destins ou mouvements linéaires faussement universels mais en créant des récits faisant confluer de multiples histoires, images, pensées, langues et sensations. Le Goubernement n’est ni un film réaliste, ni une fiction d’époque, ni une histoire rationnelle, c’est un film où les discours, les images et les formes de paroles deviennent également des personnages.
Pour Liv Schulman, ce film a été l’occasion de créer de nouvelles représentations d’artistes (celle qui n’est pas un homme, la femme de, la modèle de, etc.) mais élaborées de manière autonome, en dehors des formes de discours phallocratique. Les différents épisodes traversent et superposent plus de 70 ans d’histoire et accueillent les récits et les destins de nombreuses artistes souvent effacées du grand récit moderniste du XXe siècle comme Marie Vassilieff, Esther Carp, Maria Blanchard, Carol Rama, Claude Cahun, Suzanne Malhberbe, Marcelle Cahn, Pan Yuliang, Elsa von Freytag-Loringhoven, Shirley Goldfarb, Germaine Richier, Françoise Adnet.
Des histoires et anecdotes réelles issues de leurs vies se mêlent à la fiction dans des temporalités qui se confondent et s’amalgament dans un présent douteux. Au total ce sont plus de quarante-cinq personnages qui sont joués tour à tour par sept comédiennes et artistes : Eden Tinto-Collins, Agathe Paysant, Catherine Hargreaves, Chloé Giraud, Manuela Guevara, Viviana Méndez Moya (Curtis Putralk) et Nicole Mersey. Comme souvent dans son travail, Liv Schulman n’élabore pas une histoire linaire, rationnelle, logique, mais propose une construction collective des personnages qui est le fruit d’un processus long de travail durant le tournage, les répétitions et les improvisations avec les comédiennes. Les identités circulent, évoluent parfois jusqu’à se dissoudre : les personnages sont parfois joués par plusieurs comédiennes différentes, parfois une comédienne joue plusieurs rôles à la fois. À travers cette circulation c’est la notion même d’identité et ses constructions sociales et mentales, que le film souhaite remettre en question.
Avec un révisionnisme presque fou, Le Goubernement met à mal les narrations officielles avec comme instrument de combat l’humour, et propose une nouvelle histoire de l’art féministe qui se permet toutes les libertés, jusqu’à l’absurde.
- Liv Schulman, extrait du film Le Goubernement, 2019, Courtesy de l’artiste, © ADAGP 2019
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